Utah, Bryce Canyon,
des pentes enchantées
Utah, somptueux hérissements,
les cirques de Bryce Canyon
Depuis le sud-est sur la 12, on gravit un plateau à 2500 m d’altitude, avant de bifurquer à gauche sur la 63, pour atteindre Bryce Canyon City.
Le vent se fait parfois nettement plus frais et les parois montagneuses semi-désertiques laissent pousser quelques forêts de sapins torturés et robustes, voire de vraies forêts un peu clairsemées.
Voici une autre merveille géologique.
Mais il faut parvenir tout au bord d’une falaise dont le contour biscornu se festonne de larges amphithéâtres naturels successifs, qui ont profondément mordu le plateau ancien.
C’est en s’approchant du bord que soudain le paysage s’éclaire et s’incendie d’innombrables et très hautes aiguilles de roches (les "hoodoos"), de crêtes étroites et hérissées, peuplant comme une foule en liesse le fond profond d'immenses cirques naturels.
Sur un axe à peu près nord-sud, le parc s'étend à vol d'oiseau sur environ 30 km.
La partie la plus spectaculaire semble localisée dans le 1/10ème du parc au nord après le Visitor Center (ci-contre une vue de cette partie la plus fréquentée, issue de Google Earth).
Le reste est un régal pour les longs randonneurs.
Les amphithéâtres de hoodoos s'ouvrent vers l'est.
Le long du "Rim Trail" (le chemin en balcon qui longe le haut des falaises), et au gré des belvédères successifs, on est saisi par une extraordinaire symphonie chromatique.
Les crêtes-murailles sont si fines qu'on les croirait parfois éclairées par transparence.
Ce n'est pas le choc émotionnel décrit par d’autres, mais la découverte d'une merveille dont l’œil semble ne pas se lasser (quoique...), après le travail infiniment étiré sur des millions d’années de l’érosion du plateau sédimentaire, qui a joué des différentes duretés de sa composition.
On ne saurait pardonner au plus maladroit des photographes de ne pas en tirer de superbes images.
Le Grand Canyon dans son immuable grandeur est photographiquement insaisissable, sauf peut-être par les plus grands qui auront soigneusement choisi l'instant et la lumière.
A Bryce Canyon, enthousiasmé, le visiteur mitraille ; il ne cesse de s'extasier devant tant de beauté.
La mariée est si belle.
Puis, multipliant les vues sous mille angles tout comme les milliers d'autres visiteurs, au bout d'une seule journée où il parcourt longuement le parc, et la fatigue aidant, la profusion des panoramas, pourtant tous différents, finit par émousser son exaltation.
Sans pour autant qu'il cesse de capturer, par habitude.
Mais le miracle a lieu dès le retour à la maison : la plupart des photos de Bryce Canyon sont un enchantement. Ce site reste un extraordinaire feu d'artifice visuel.
Dans le parc-forêt que traverse la route, sillonnée par les voitures pour une partie et par les shuttles, quelques antilopes locales, longues oreilles, broutent paisiblement, sans crainte des touristes qui stoppent leur voiture pour savourer le spectacle.
Les mêmes qu’au bord sud du Grand Canyon.
Depuis le bord des cirques, sur des chemins de piste blancs qui deviennent parfois ocres, il est possible à partir de tel ou tel point de vue de descendre et de se faufiler entre les aiguilles rocheuses.
Sur le sentier de la "Navajo Loop"
Là, pour avoir parcouru la « Navajo Loop » sur 1,6 km et 189 mètres de dénivelé, on apprécie mieux l'ampleur et la dimension des aiguilles, à travers des lacets pentus, bordés parfois de fenêtres vertigineuses.
Un bon moyen de découvrir d’autres splendeurs rocheuses cachées, pour enfin remonter hardiment vers notre point de départ qui nous paraît bien haut.
Sur le long balcon, le "Rim Trail", et dans la forêt clairsemée avoisinante, une même variété de vifs et véloces petits écureuils, que certains nomment "chipmunks" (est-ce le vrai nom?) vit sa vie, à l'affût des miettes.
Une autre petite marche facile, nommée "Queen Garden Trail" (le chemin du jardin de la reine) part de "Sunrise Point" parvient à un hoodoo isolé, d'une blancheur virginale, nommé "Queen Victoria hoodoo". Le ciel au loin s'assombrit et déverse des barres de pluie, que nous n'aurons pas à subir.
... et sur celui du "Jardin de la Reine"
Le premier lundi de septembre est ici férié, c’est le « Labour Day », le jour du travail.
Et le seul jour (lundi 3 septembre 2018) où nous pouvons consacrer tout notre temps à la visite.
Pas facile alors de trouver une place pour notre voiture sur les parkings successifs des « Viewpoint »,
Nous décidons de venir la garer le matin pour la journée au « Sunset Point », puis d’emprunter les shuttles, après avoir pris connaissance de leur circuit, et avoir réservé le pass gratuit à Bryce Canyon.
Tous conduits par des seniors, les shuttles ont l’avantage d’atteindre aussi des sites interdits aux voitures.
D’un point de départ tout proche, une autre piste est empruntée par un groupe de cavaliers, qui s’enfonce progressivement dans les profondeurs du canyon ; à certains passages pentus, on entend quelques cris de frayeur de cavaliers et un cheval hennir.
La prudente marche s’arrête quelques instants pour entendre les recommandations du conducteur de la « cordée » (car raide est la pente) à cheval.
Puis plus tard, encore complet mais bien étiré, le même groupe émerge de dunes pétrifiées, depuis un autre versant de la vallée.
L’orage qui au loin se prépare apporte le contraste frappant d’un ciel noir qui vomit une barre de pluie au loin, libérant les splendeurs des cirques de premier plan.
Le petit village de Bryce Canyon, certainement de construction encore récente, est aménagé avec des boutiques à touristes déguisées en façades de western et un immense parking à côté d’un vaste et superbe comptoir commercial où l’on peut manger et acheter tous types de souvenirs.
Divers hôtels très espacés accueillent les visiteurs.
Parmi la population des touristes qui parcourent ces merveilles géologiques naturelles, il semble assez simple de différencier les américains des européens, voire des français.
L’ossature vigoureuse, la haute taille bien prise pour les hommes, une belle prestance physique qui ferait de toutes les femmes âgées d'anciennes miss locales, identifient souvent sans erreur possible les habitants du Nouveau Continent par rapport aux autres.
Il y a aussi, outre la clarté de l’œil, une sorte de détachement tranquille, une manière plus lente de se mouvoir peut-être, qu’on ne retrouve pas chez les français compulsifs, même quand, pris de passion pour la Harley, ils tentent d'entrer dans la peau de bikers rock and roll et bouclent sur leur monture de grands périples.
Un spectacle de rodéo pour touristes se tient aussi le samedi et un autre jour de la semaine, que nous ne verrons pas.
Paysages envoûtants...
et quelques autres encore...
Travail de l'érosion et plan du parc
L'érosion du plateau de Paunsaugunt où se trouve le parc a formé différentes structures géologiques nommées murailles et hoodoos.
La couche géologique supérieure du plateau, la formation de Claron, est composée de roches sédimentaires et calcaires assez friables.
Particulièrement sous l'effet des cycles de gel dégel (jusqu'à 200 fois par an), les bords du plateau s'érodent au fil du temps et forment des avancées de plus en plus étroites en forme de murs. Ceux-i se perforent ensuite en leurs points les plus faibles et des arches apparaissent, qui s'agrandissent avant de se briser, formant alors des piliers appelés hoodoos.
Les hoodoos ont des hauteurs variant de 1,5 à 45 mètres, et une épaisseur sur toute leur hauteur très fluctuante, ce qui les différencie d'une simple colonne et leur donne des formes très variées. Certains d'entre eux ont été baptisés comme le « Marteau de Thor », la « Reine Victoria », ou « E.T.18 ».
La roche dans laquelle se forment les hoodoos, date du Paléocène ou de l'Éocène (40 à 60 millions d'années). Elle est surtout composée de calcaire mais aussi d'un peu de sables et d'argiles issus de dépôts de sédiments accumulés au fond de lacs peu profonds aujourd'hui disparus.
Leur coloration provient des différents minéraux qu'ils incluent. La roche est aussi érodée par l'acidité des eaux pluviales. Les hoodoos ont une meilleure résistance à l'érosion par rapport à la roche qui les entoure grâce à la fine couche supérieure de protection contenant du magnésium plus résistant aux intempéries.
On estime que l'érosion du plateau se fait à un rythme de 0,6 à 1,3 mètre par siècle, ce qui signifie qu'à ce rythme, de nouveaux hoodoos pourront encore se former pendant environ trois millions d’années.
Utah,
(plus) modeste et pittoresque
Red Canyon
Quand on prend la route 89 de Bryce Canyon village vers Panguitch, au-delà de quelques miles sur un plateau sans intérêt longeant un petit aérodrome, on descend en sinuant à travers un paysage ici encore ocre, aux versants bien moins prononcés qu’à Bryce Canyon.
C’est « Red Canyon », très pittoresque et facilement accessible à pied ; un modeste Bryce Canyon, plus à l'échelle humaine ; à notre échelle.
On accède au Visitor Center après quelques virages où la route passe sous deux épaisses arches successives, qui en réalité ont été ouvertes par l'homme pour l'inauguration de la route qui traverse ce parc en 1925.
à l'aller
et au retour
Moins hauts, colonnes et pics sont aussi moins nombreux et plus massifs, mais au milieu de pins vigoureux qui font ici presque une forêt.
L'érosion sculpte des rochers, en fait des statues, des dalles en surplomb, de fragiles colonnes en équilibre instable, des cavernes profondes, des refuges faciles ; Butch Cassidy et sa bande sont passés par là.
Une petite randonnée sur des sentiers de balcon permet de savourer d’autres beaux paysages.
Un hors d'oeuvre avant Bryce Canyon... ou bien si c'est après, une tranquille et salutaire tisane après un repas trop copieux.