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Deux pittoresques villages,

le vaste massif ocre de l'Estérel, 

et d'autres modestes flâneries

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1- En retrait de la côte, deux pittoresques villages

Malgré l'attrait indéniable de la côte, l'encombrement de ses boulevards, la densité des commerces tous orientés vers le tourisme de masse lassent assez vite, même dans le contexte sanitaire en cours.

Nous nous engageons donc dans la visite de deux villages en retrait, choisis en fonction de leur degré de pittoresque et qui illustrent un peu chacun l'histoire du pays, Roquebrune-sur-Argens et Fayence.

Nous éviterons celle de Puget-sur-Argens, voisin de Roquebrune, en raison du manque total d'attrait ressenti quand nous l'avons traversé un peu par hasard.

Roquebrune-sur-Argens

Roquebrune-sur-Argens

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L’un, à environ 9 km à vol d'oiseau à l'ouest de Fréjus, mais qui possède un accès à la mer (avec Les Issambres), est donc celui de Roquebrune-sur-Argens.

Le centre ancien s'enroule de manière très caractéristique en trois rues semi-circulaires concentriques bordées d’habitations resserrées autour du sommet de la colline et de l'église St Pierre et St Paul, qui domine de 50 mètres la vallée de l'Argens.

Dans l'axe de la rue d'accès, au loin vers l'ouest, un massif isolé, élevé et trapu, tout de grès rouge surplombe l’autoroute est-ouest et domine de ses 373 mètres la large vallée. C'est le Rocher de Roquebrune.

Rocher de Roquebrune (83)

La formation du Rocher de Roquebrune date de l'ère primaire vers -420 millions d'années, à l'époque du Gondwana.

Durant près de 100 millions d'années s'accumulent les sédiments marins qui forment ici notamment la plaine de l'Argens. Puis des plissements créent d'abord le massif des Maures à l'ouest, ensuite celui du Rocher de Roquebrune et le Massif de l'Estérel.

La visite, même hâtive du village historique décèle de bien agréables recoins, qui mériteraient qu'on s'y attarde beaucoup plus. 

La fontaine-lavoir près des arcades au sol pavé, la netteté de la restauration des vieux murs de pierre, le clin d'oeil d'un énorme robinet qui doit symboliser la rareté, et donc la valeur de l'eau,  autant d'atouts agréables sous le ciel très pur. 

Le territoire de Roquebrune-sur-Argens était traversé par une voie romaine, probablement la fameuse Voie Aurélienne.. En témoigne une borne milliaire (elle mesurait les milles romains ; 1 mille romain = 1481 mètres). 

Au sommet du Pétignon est fondé le premier village, un peu à l'ouest de l'actuel site, entre le 8ème et le 11ème siècle , sous le nom latin de Rocca Bruna en référence au Rocher de Roquebrune auquel on s'adosse par le sud.

En 973Guillaume Ier, comte de Provence, chasse les Sarrasins présents ici depuis plus d'un siècle. 

Le prieuré détenu par l’abbaye Saint-Victor de Marseille est probablement fondé au 9ème siècle dans la zone juste au nord dite de Palayson.

Le concile de Vienne, réuni par le pape Clément V entre octobre 1311 et mai 1312 décide l'excommunication des Templiers ; il en reste à l'entrée sud du village, dans un mur extérieur de la chapelle Saint-Pierre le corps  d'un membre de l'Ordre, tête en bas..

Au 14ème siècle, le seigneur de Roquebrune, auparavant rallié au comté de Provence, se soumet à son adversaire Louis II d'Anjou en 1388 et obtient un « chapitre de paix ». 

Le village passe tout le Moyen Âge sans subir les envahisseurs ni les épidémies comme la peste noire.

La construction de l'église paroissiale, cette fois sur le sommet même de la colline actuelle, est achevée en 1535.

 

Au 15ème, le village s'étend ; c'est vers 1540 que sont crées  les arcades "de la place haute".

Pendant les guerres de Religion, le village devient un refuge pour les "carcistes" (catholiques intransigeants, enragés), qui en décousent avec le parti des "razats" rassemblant huguenots et catholiques modérés. Les deux partis s'étripent et mettent la Provence à feu et à sang.

.Assiégés par les razats, les carcistes ici réfugiés en 1592, se rendent et sont tous massacrés.

 

La paix revenue, le village se développe au 17ème siècle, principalement autour de la polyculture. 

Avec la construction du Pont d'Argens en 1829 qui permet d'atteindre la route dite "d'Italie", puis, en 1863, l'arrivée du chemin de fer, la viticulture notamment se développe, puis le tourisme.

Fayence

Fayence
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L'autre village, directement au nord de Fréjus dont il est distant d'environ 22 km à vol d'oiseau, un peu à l'ouest du lac de St-Cassien, surplombe une vaste vallée en bordure de monts plus élevés.

Dominant fièrement le site, on l'aperçoit à distance du haut de ses 380 mètres, 150 mètres au-dessus de la vallée.

 

C’est Fayence, dont la frange blanche se prolonge plus à l'est avec le village perché de Tourettes.

Fayence sur ses hauteurs (83)

La pente est raide pour atteindre le sommet et sa plateforme contre un clocher à campanile.

La partie historique est ramassée autour du sommet, dont le versant est beaucoup plus pentu qu'à Roquebrune.

Mais de là, le panorama par dessus le diversité des pans de toits de tuiles rondes est superbe, sur la vallée et le Château du Puy à Tourettes.

Un peu plus bas, un balcon belvédère offre de superbes vues sur la vallée. Ruelles étroites, passages sous porte en voûte (comme le bâtiment de la mairie qui enjambe la rue) se succèdent.

Vallée vue depuis Fayence (83)
Toits à Fayence (83)

Extrait du Petit Futé :

"Natif de Tourrettes, le général Alexandre Fabre, l'un des premiers polytechniciens de France, fut envoyé par Napoléon auprès du tsar Alexandre Ier pour tracer les routes de l’Empire russe. À son retour, il fit construire ce château, la réplique fidèle, dit-on, de l’école des cadets de Saint-Pétersbourg... Quelque peu tombé en ruines depuis, il fut restauré en 1970 et revendu en appartements..." C'est un domaine privé qui ne se visite pas.

Le site est déjà bien connu des Romains où ils créent la cité de Favienta Loca (« lieu agréable »).

Fayence dépend dès  794 de l'évêché de Fréjus ; distante de la mer, elle est le lieu de villégiature et de repos pour ses évêques. Plus tard, ils possèdent ici un château ; celui  que monseigneur de Fleury - futur cardinal et ministre des Finances - fait détruire en 1710, le jugeant « inutile et dispendieux » (1).

Convergences patronymiques, grâce à une fabrique de faïence, la ville se repeuple notamment par des habitants de Callian (un village perché juste à l'est), après sa destruction par le terrible et belliqueux Raimond de Turenne en 1391.

Lors des guerres de religion, Fayence reçoit le 18 octobre 1590 mission de « raser, démolir et abattre » le château de Tourrettes, la petite cité voisine, qui servait de refuge aux carcistes.

À partir de 1782, les droits de seigneurie sont rachetés à l'évêque de Fréjus. Fayence devient commune libre et son seul seigneur est donc le roi.

S'ensuivent les péripéties de la Révolution française, auxquelles la commune de Fayence participe très activement "et parfois de sanglante façon".

(1)  Cependant, à côté de la Tour de l'Horloge au sommet de la colline affleure parmi les rochers un bout du donjon

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château de Fayence
Le Massif de l'Estérel

2- Le Massif de l'Estérel, notre Far-West superbe et modeste, tout à l'est

L’Estérel, premier et court contact, juste pour mise en appétit.

Ses pentes de chênes et de pins, parfois d’eucalyptus, ses rocs élevés, dont le sommet est le Mont Vinaigre se parcourent en voiture (mais aussi à pied, à vélo...), notamment ici depuis Agay.

Déjà, le massif étale depuis le village et par-dessus les toits ses surprenantes couleurs de Far-West.

L'Estérel vu depuis Agay (83)
la rhyolithe

La rhyolithe compose le Massif pour l'essentiel. Cette roche volcanique claire et rosée, datant de -290 millions d'années, donne au fil des centaines de millions d'années cette belle coloration ocre vif sous le soleil oblique. 

Sa genèse est 'beaucoup plus jeune" que celle du Massif des Maures à l'ouest, fait de granite et de gneiss formés entre -600 et -430 millions d'années. Massif plus vieux et plus terne...

En remontant la route qui suit la petite rivière Agay, on oblique à droite pour gravir un peu la pente et entrer dans le parc de l'Estérel, par la rue de Gratadis.

Le plan ci-dessous provient du site "OpenStreetMap".

Sur plusieurs parcours de dizaines de kilomètres, la route sinue, longe la vallée évasée du petit Grenouillet, monte en lacets parfois en épingle vers l'est.

La route bitumée en balcon fait une boucle finale vers le sommet le plus au nord-est, parfois un peu vertigineuse, et où le sens unique imposé évite d'avoir à craindre d'impossibles croisements. 

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Agay

Mont Vinaigre

Pic de l'Ours

Pic du Cap Roux

Autre vue de l'Estérel (83)

Les sommets  assez arrondis et les pentes peu escarpées se hérissent de quelques rochers isolés au milieu du maquis et de forêts de chênes courts et de pins maritimes.

Ils composent de beaux et vastes panoramas sur le fond bleuté des reliefs les plus lointains à l'ouest, sillonnés de pistes blanches.

De beaux paysages auxquels il manque un peu du souffle des vrais grands espaces, ceux dont on garde la mémoire-choc dans l'Ouest nord-américain

La route passe à un moment à l'ombre d'une haute falaise presque humide, qui dissimule la caverne de l'ermite St Honnorat (dite aussi de la Ste-Baume ; rien à voir avec le massif du même nom, beau promontoire à l'est de Marseille), et au sommet de laquelle se dresse le Pic du Cap Roux.

Le Pic de l'Ours dans l'Estérel (83)

Quelques lacets plus haut vers le nord-est, voici le sommet du Pic de l'Ours, qui serait (car là encore les avis ne convergent pas) le 2nd sommet le plus élevé du Massif après le Mont Vinaigre.

De hauts belvédères permettent de contempler à loisir, dans le silence, sous l’horizon éblouissant quelque part vers l'orient, les franges urbaines côtières et le parcours sinueux de la voie ferrée dont le tracé emprunte parfois des tunnels, coupant court derrière de somptueuses résidences sur la falaise rouge.

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Côte est vers Cannes au loin, depuis l'Estérel (83)
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Les avis sont unanimes : la rocade sur mer qui contourne le massif depuis l'est vers le sud-ouest en épousant étroitement le contour serpentin et torturé de la côte, que double au plus droit la ligne ferroviaire,  est une merveille, à côté duquel le Massif paraît presque terne. Et qui mérite bien son surnom de "Corniche d'Or".

Bien sûr, la corniche sera précisément le parcours qui manquera à notre séjour...

Pourtant le Massif reste un majestueux et assez inégalable terrain de loisir.

Ce premier contact pépère (en voiture seulement) ouvre en tout cas l'appétit pour de très belles et riches randonnées ultérieures, si l'intention ne se fait pas velléité et qu'au pied du mur, les mollets et le souffle suivent.

3- Flâneries et autres curiosités

hardes urbaines et hures très hardies

Hardes urbaines, et hures très hardies

Sur un parking du Massif, voici, inopiné, un sanglier, qui ne s'enfuit pas à notre approche mais s'éloigne paisiblement et s'infiltre dans les buissons du maquis.

 

Peut-être une femelle, à voir le soin avec lequel elle entretient ses délicats sabots pointus et ses soies bien lustrées.

L'un d'eux vient même un soir nous rendre visite, et passe sans hâte devant la petite terrasse en plain pied du bungalow.

Toujours protégés avec interdiction de les nourrir, ils prolifèrent, là comme ailleurs, en quête de nourriture facile près des habitations.

Devant le bungalow de notre hébergement, le sol pourtant sec, est labouré par les défenses (canines inférieures) de ces animaux nocturnes qui doivent y chercher vers et racines.

Au point qu'ici, la municipalité de Fréjus envisage de ramener les tournées des bennes à ordures du petit matin à la nuit qui précède, pour éviter les sacs éventrés et les poubelles dévastées par les hardes.

sanglier dans l'Estérel (83)

En passant aussi, un autre animal tout de métal cette fois,  muet et mobile, bizarre, avec des yeux partout :, LA voiture Google qui collecte ses images "street view" dans le flux de circulation de St-Raphaël.

Peu à dire sur l'agglomération de St-Raphaël, qui s'amalgame avec celle de Fréjus en proximité immédiate. 

Mais une peu agréable impression, celle d'une population touristique assez dense qui laisse préjuger de la horde qu'elle devient en temps normal et un zone côtière séparée en deux parties nord-sud par la voie ferrée, obstacle qu'on ne franchit en voiture que par un étroit et malcommode tunnel.

Voiture Google à St-Raphaël (83)

Pour revenir à l'animal bipode, enfourchant un deux-roues ou se translatant sur le siège mobile de son engin à moteur, en voici qui visitent deux curiosités locales de leur propre création, la chapelle N.-D. de Jérusalem dite "chapelle Jean Cocteau" et la pagode du culte bouddhique, à Fréjus.

La chapelle Cocteau

La chapelle Cocteau

Depuis une route au nord de Fréjus, par un chemin blanc de 500 mètres très justement interdit aux voitures, où ne crissent que nos pas et dérapent les pneus de vélos d'autres groupes, paisible entre chênes et pins espacés, voici la chapelle Notre-Dame de Jérusalem.

L'édifice, modeste mais harmonieux, quoique d'inspiration vénitienne et romaine est d'une architecture parfaitement originale : un octogone ceint d'une galerie extérieure courante derrière arcades.

 

C'est un sanctuaire pour l'ordre du St-Sépulcre, dont la croix tronquée coiffe l'édifice.

Depuis longtemps amoureux de la Côte, vers la fin de sa vie, Jean Cocteau est sollicité pour décorer ce monument dont Martinon, un banquier niçois est l'initiateur et le promoteur.

Mais le 11/10/1963, quelques mois après le début des travaux en février, Cocteau décède, le même jour qu'Edith Piaf son amie. Son ancien amant, devenu son fils spirituel, Edouard Dermit fera réaliser les fresques qu'il avait imaginés, de même que l'ensemble décoratif. Tout sera achevé en 1965.

L'artiste a beaucoup plus marqué cette oeuvre que son promoteur ; on ne se souvient ici que du premier.

Chapelle Cocteau à Fréjus (83)

A l'intérieur, le contraste est remarquable entre d'une part les fenêtres, les portes en vitraux et le sol pavé de faïences vivement colorées, et d'autre part les 8 pans de murs décorées d'oeuvres préparées par Jean Cocteau pour l'édifice.

Principalement des scènes de la Passion du Christ, avec une touche "people" où figurent dans la représentation de la Cène,  quelques célébrités des années 60 (Coco Chanel, l'inévitable Jean Marais, l'auteur lui-même,...) dans le style cursif, élégant, faux-naïf et vigoureux des dessins parfaitement reconnaissables du maître.

Intérieur de la chapelle Cocteau à Fréjus (83)

Cocteau himself

Jean Marais

Coco Chanel

peut-être 

Raymond Radiguet?

Edouard

Dermit

Max Jacob

peut-être 

Georges Auric?

peut-être 

Darius Milhaud?

La pagode de Fréjus

La pagode de Fréjus

Dans la même partie du nord de Fréjus, l'oeil est soudain surpris et attiré par des statues aux couleurs vives entre aperçues à travers une belle colline boisée qui surmonte un carrefour fréquenté.

C'est la pagode de Fréjus.

C'est la plus ancienne de France, érigée à l'initiative de gradés militaires en 1917 à côté du camp militaire Gallieni où attendaient d'être déployés des tirailleurs indochinois.

Abandonnée ensuite jusqu'après le 2nde guerre mondiale, et tombant en ruine, elle est reprise en main par des réfugiés vietnamiens à partir de 1954.

On y trouve, avec ce kitsch respectable des représentations colorées propres à cette religion-philosophie toute la spectaculaire panoplie des statues du Bouddha, de ses disciples, de son histoire, et un bestiaire de statues ajouté là plus récemment.

Marlène semble s'y perdre...

Tout en harmonie pourtant, le petit parc de beaux pins parasols, de cyprès épais qui jouent aux ifs, de vieux chênes lièges et de quelques oliviers, incite au recueillement.

ite de la pagode à Fréjus (83)

Pas de stûpa, mais un fourre-tout qui manque d'unité quand on a connu, par exemple au Sri Lanka, la parfaite sérénité qui s'imposait d'elle-même dans ce type de lieu de culte ; une déclinaison particulière de la variante vietnamienne du bouddhisme?

On ne parvient à retrouver cette impression de sérénité qu'en "isolant" quelques perspectives, en séparant par l'esprit telle enfilade  de statues ou tel groupe de représentations.

Le bouddha couché, étincelant de doré, en est un cas assez saisissant.

Manifestement, ce sanctuaire, qui a l'ambition de  rassembler autant d'objets manque de respiration, et donc surtout d'espace, mais reste un lieu très original.

Les disciples du Bouddha àa la oagode de Fréjus (83)
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