La Vltava et le Pont Charles à PRAGUE
Vltava, ne l'appelez pas la Moldau,...
La Vltava à Prague, belle rivière à contempler...
En allemand, c'est la Moldau, un nom que les tchèques ont du mal à accepter (longue histoire oblige).
Paisible là, la Vltava est pourtant parfois violente et débordante (comme le dit son étymologie qui signifie "eau sauvage"), envahissante, au point qu’au fil du temps, les architectes ont voulu s’en prémunir par remblaiement ; une inondation en 1784 manque d’emporter le pont Charles, et la plus récente en août 2002 endommage certains quartiers riverains et le métro, mais sans affecter la Vieille-Ville, bien protégée par des barrières anti-crues.
La Vltava constitue cette immense artère naturelle qui donne à la ville, plus dense à l’est qu’à l’ouest une belle et majestueuse respiration.
On comprend, sans en connaître plus, qu'elle ait pu inspirer une fameuse ligne mélodique à l’un des enfants de la ville, Smetana.
Et voici cet air qui ressurgit dans la mémoire, facile, romantique (au sens populaire, et non musical du terme), obsessionnelle avec l'un de ses poèmes symphoniques, celui de « la Moldau ».
Traversée d'une grosse dizaine de ponts, son flux est cassé par de petites pentes aménagées qui délimitent des biefs.
Le parcours des bateaux-mouches à la parisienne en est limité d'autant. On les voit manoeuvrer agilement.
Les autres embarcations plus petites comme les pédalos ou les canoës, souvent "disneymorphes" pour amuser les enfants, pullulent sur certains biefs comme moucherons sur flaque ou canetons sur mare, mais sans en avoir la vivacité.
Depuis ses rives, on peut traverser les quatre quartiers historiques, les apercevoir, en deviner et en contempler souvent le pittoresque.
Ainsi, le quartier du "Petit Côté", avec ses charmants canaux qui se détachent de la rive ouest.
Ou Hradcany dont on aperçoit les imposantes hauteurs, là-bas sur la colline au nord-ouest.
Ou bien la Ville Nouvelle (1348!!) avec son cortège de façades Art Nouveau qui bordent ses rives, et qui, elles, ne datent que du tout début du 20ème siècle.
Le célèbre Pont Charles
en 1562
Le premier pont en pierre de Prague fut construit entre 1160 et 1172, à la demande de la reine Judith dont il portait d'abord le nom. D'environ 514 mètres de long sur 7 mètres de large, il était soutenu par 27 arches basses.
Au mois de février 1342, à la fonte des glaces, les 2/3 du pont s'éffondrèrent. Il fallait donc le remplacer.
Sa construction est entreprise en 1357 sous le règne de Charles IV. Ce sera donc le pont Charles.
Bien des inondations nécéssitèrent plusieurs reconstructions, jusqu'en 2001.
Le plus ancien lien qui unit les deux rives est donc le fameux Pont Charles, entre d'une part le "Petit Côté" à l'ouest d'où il s'élève par dessus les restes du pont Judith et un petit canal latéral de la Vltava et d'autre part la Vieille Ville à l'est.
Si à vol d'oiseau, la portée serait de 300 mètres, avec le prolongement vers le "Petit Côté" et son contour courbe, sa longueur totale est de 515 mètres (comme son prédecesseur) sur une douzaine d'arches amples.
Seule voie reliant les deux rives jusqu'au 19ème siècle, le tramway l'emprunte même entre 1905 et 1908. Il est ouvert aux voitures au moins jusque dans les années 60.
Si l'on s'y attarde, ce n'est pas seulement à cause des beaux points de vue qu'il offre, mais à cause du caractère presque rustique, bancal diront d'autres de son parcours, certainement pas rectiligne et qui s'infléchit légèrement deux fois, plus nettement dès qu'on aborde l'île de la rive gauche. Un autre charme qui, en rompant un peu les perspectives, ajoute à la séduction de la ville.
Mais de fait, la forme globale, convexe vers l'amont, n'était pas le fruit du hasard, mais bien étudiée (déjà au 14ème siècle) pour s'opposer à la puissance des flots.
vue du pont vers la Vieille Ville
Réservé aux seuls piétons sur la chaussée pavée, dès le matin, il s'encombre de la multitude de touristes du monde entier (6 millions de visiteurs en 2018) qui déambulent dans les deux sens, posent contre ses parapets ou sous les groupes sculptés qui s'élèvent au-dessus des piliers. Là ils s'accoudent ou s'affaissent, fatigués, sur la murette des modestes décrochements à la verticale des piliers.
l'autre extrémité vers le "Petit Côté"
et là,... presque miraculeusement déserte
Le pont conserve à chacune de ses extrémités ses hautes portes médiévales flanquées d'échauguettes acérées (plus de décoration que de défense) et de créneaux, dans un pur style gothique, alors qu'autour se déploient les fastes baroques.
Leur toit d'ardoise en crête aiguë à deux pans principaux, dressé comme une mèche punk leur confère une remarquable élégance.
Les groupes de statues qui jalonnent le pont sont à fort caractère religieux dans une représentation totalement baroque, donc bien postérieure à la construction du pont (autour de 3 siècles plus tard).
Parfois fantomatiques, oiseaux penchés de mauvais augure, les statues semblent chargées d'une menace comminatoire dont les passants se moquent bien.
Curieusement, effet voulu ou insuffisance des moyens de restauration, la plupart (à quelques exceptions près) restent ternes ou de la sombre noirceur à laquelle mène la pollution, mais que relèvent de fines décorations dorées - croix, couronnes, sceptres, crosses,... - métalliques. Comme si la ville avait décidé de jouer de ce contraste et d'en tirer parti plutôt que d'entreprendre de tout ravaler.